法语阅读:追忆似水年华17

全国等级考试资料网 2019-01-20 09:12:30 47

– ’a t d’abord un nom de victoire, princesse, dit le gnral. Qu’est-ce que vous voulez, pour un vieux briscard comme moi, ajouta-t-il en tant son monocle pour l’essuyer, comme il aurait chang un pansement, tandis que la princesse dtournait instinctivement les yeux, cette noblesse d’Empire, c’est autre chose bien entendu, mais enfin, pour ce que c’est, c’est trs beau dans son genre, ce sont des gens qui en somme se sont battus en hros.

– Mais je suis pleine de respect pour les hros, dit la princesse, sur un ton lgrement ironique : si je ne vais pas avec Basin chez cette princesse d’Ina, ce n’est pas du tout pour a, c’est tout simplement parce que je ne les connais pas. Basin les connat, les chrit. Oh ! non, ce n’est pas ce que vous pouvez penser, ce n’est pas un flirt, je n’ai pas m’y opposer ! Du reste, pour ce que cela sert quand je veux m’y opposer ! ajouta-t-elle d’une voix mlancolique, car tout le monde savait que ds le lendemain du jour o le prince des Laumes avait pous sa ravissante cousine, il n’avait pas cess de la tromper. Mais enfin ce n’est pas le cas, ce sont des gens qu’il a connus autrefois, il en fait ses choux gras, je trouve cela trs bien. D’abord je vous dirai que rien que ce qu’il m’a dit de leur maison... Pensez que tous leurs meubles sont Empire >>!

– Mais, princesse, naturellement, c’est parce que c’est le mobilier de leurs grands-parents.

– Mais je ne vous dis pas, mais a n’est pas moins laid pour a. Je comprends trs bien qu’on ne puisse pas avoir de jolies choses, mais au moins qu’on n’ait pas de choses ridicules. Qu’est-ce que vous voulez ? je ne connais rien de plus pompier, de plus bourgeois que cet horrible style avec ces commodes qui ont des ttes de cygnes comme des baignoires.

– Mais je crois mme qu’ils ont de belles choses, ils doivent avoir la fameuse table de mosaque sur laquelle a t sign le trait de...

– Ah ! Mais qu’ils aient des choses intressantes au point de vue de l’histoire, je ne vous dis pas. Mais a ne peut pas tre beau... puisque c’est horrible ! Moi j’ai aussi des choses comme a que Basin a hrites des Montesquiou. Seulement elles sont dans les greniers de Guermantes o personne ne les voit. Enfin, du reste, ce n’est pas la question, je me prcipiterais chez eux avec Basin, j’irais les voir mme au milieu de leurs sphinx et de leur cuivre si je les connaissais, mais... je ne les connais pas ! Moi, on m’a toujours dit quand j’tais petite que ce n’tait pas poli d’aller chez les gens qu’on ne connaissait pas, dit-elle en prenant un ton puril. Alors, je fais ce qu’on m’a appris. Voyez-vous ces braves gens s’ils voyaient entrer une personne qu’ils ne connaissent pas ? Ils me recevraient peut-tre trs mal ! dit la princesse.

Et par coquetterie elle embellit le sourire que cette supposition lui arrachait, en donnant son regard bleu fix sur le gnral une expression rveuse et douce.

– Ah ! princesse, vous savez bien qu’ils ne se tiendraient pas de joie...

– Mais non, pourquoi ? lui demanda-t-elle avec une extrme vivacit, soit pour ne pas avoir l’air de savoir que c’est parce qu’elle tait une des plus grandes dames de France, soit pour avoir le plaisir de l’entendre dire au gnral. Pourquoi ? Qu’en savez-vous ? Cela leur serait peut-tre tout ce qu’il y a de plus dsagrable. Moi je ne sais pas, mais si j’en juge par moi, cela m’ennuie dj tant de voir les personnes que je connais, je crois que s’il fallait voir des gens que je ne connais pas, mme hroques >>, je deviendrais folle. D’ailleurs, voyons, sauf lorsqu’il s’agit de vieux amis comme vous qu’on connat sans cela, je ne sais pas si l’hrosme serait d’un format trs portatif dans le monde. a m’ennuie dj souvent de donner des dners, mais s’il fallait offrir le bras Spartacus pour aller table... Non vraiment, ce ne serait jamais Vercingtorix que je ferais signe comme quatorzime. Je sens que je le rserverais pour les grandes soires. Et comme je n’en donne pas...

– Ah ! princesse, vous n’tes pas Guermantes pour des prunes. Le possdez-vous assez, l’esprit des Guermantes !

– Mais on dit toujours l’esprit des Guermantes, je n’ai jamais pu comprendre pourquoi. Vous en connaissez donc d’autres qui en aient, ajouta-t-elle dans un clat de rire cumant et joyeux, les traits de son visage concentrs, accoupls dans le rseau de son animation, les yeux tincelants, enflamms d’un ensoleillement radieux de gaiet que seuls avaient le pouvoir de faire rayonner ainsi les propos, fussent-ils tenus par la princesse elle-mme, qui taient une louange de son esprit ou de sa beaut. Tenez, voil Swann qui a l’air de saluer votre Cambremer ;l... il est ct de la mre Saint-Euverte, vous ne voyez pas ! Demandez-lui de vous prsenter. Mais dpchez-vous, il cherche s’en aller !

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